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Les titres par année de parution


Khôra
Format : 12,5 x 21,5 cm
Nombre de pages : 112
Prix : 22 €
Date de parution : 1993
ISBN : 9782718607306




Khôra

Réédition de 2006

PRÉSENTATION

Chacun de ces trois essais, Passions, Sauf le nom, Khôra, forme un ouvrage indépendant et peut se lire comme tel. Si toutefois il a été jugé opportun de les publier simultanément, c’est que malgré l’origine singulière de chacun d’eux, le fil d’une même thématique les traverse. Ils forment une sorte d’Essai sur le nom – en trois chapitres ou trois temps. Trois fictions aussi. À suivre les signes qu’en silence les personnages de telles fictions s’adressent l’un à l’autre, on peut entendre résonner la question du nom, là où elle hésite au bord de l’appel, de la demande ou de la promesse, avant ou après la réponse.
Le nom : qu’appelle-t-on ainsi ? qu’entend-on sous le nom de nom ? Et qu’arrive-t-il quand on donne un nom ? Que donne-t-on alors ? On n’offre pas une chose, on ne livre rien et pourtant quelque chose advient qui revient à donner, comme l’avait dit Plotin du Bien, ce qu’on n’a pas. Que se passe-t-il surtout quand il faut surnommer, re-nommant là où, justement, le nom vient à manquer ? Qu’est-ce qui fait du nom propre une sorte de surnom, de pseudonyme ou de cryptonyme à la fois singulier et singulièrement intraduisible ?

« Le plus ancien des trois essais, n’en est pourtant pas la “matrice” ou le “porte-empreinte” originaire, comme on pourrait être tenté de le penser. Il situe seulement une aporie exemplaire du texte platonicien. Le Timée nomme khôra (localité, lieu, espacement, emplacement) cette “chose” qui n’est rien de ce à quoi pourtant elle paraît “donner lieu” – sans jamais rien donner pourtant : ni les paradigmes idéaux des choses ni les copies qu’un démiurge insistant, l’idée fixe sous les yeux, inscrit en elle. Insensible, impassible mais sans cruauté, inaccessible à la rhétorique, khôra décourage, elle “est” cela même qui désarme les efforts de persuasion – et quiconque voudrait avoir le cœur de croire ou le désir de faire croire : par exemple aux figures, tropes ou séductions du discours. Ni sensible ni intelligible, ni métaphore ni désignation littérale, ni ceci ni cela, et ceci et cela, participant et ne participant pas aux deux termes d’un couple, khôra, dite aussi “matrice” ou “nourrice”, ressemble pourtant à un nom propre singulier, à un prénom, plus tôt, à la fois maternel et virginal (voilà pourquoi on dit ici khôra et non, comme toujours, la khôra) alors que pourtant, dans une expérience qu’il s’agit de penser, elle appelle en silence le surnom qu’on lui donne et se tient au-delà de toute figure maternelle, féminine – ou théologique. Et le silence au fond duquel ainsi khôra semble appeler son nom, mais en vérité le surnom d’un prénom, ce n’est peut-être même plus une modalité ou une réserve de la parole. Pas plus que ce fond sans fond ne promet la nuit d’un jour. Il n’y a, au sujet de khôra, ni théologie négative ni pensée du Bien, de l’Un ou de Dieu au-delà de l’Être. Cette incroyable et improbable expérience est aussi, entre autres dimensions, politique. Elle annonce une pensée, plutôt, sans la promettre, une mise à l’épreuve du politique. Et Socrate, quand il fait mine de s’adresser aux autres et de parler de la politeia en passant (qu’il est, dans une vie trop courte), voilà qu’il se met à lui ressembler, à elle, khôra, à la jouer dans une fiction qui sera toujours passée inaperçue, à la figurer, elle, l’intangible, l’insaisissable, l’improbable, toute proche et infiniment lointaine, elle qui reçoit tout par-delà l’échange et par-delà le don. Elle comme ce qu’il faut encore, Nécessité, sans dette. »

J. D.

© Éditions Galilée
Site édité avec le concours du Centre national du livre
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